
100 moments de télé, épisode 9 (The Shield, The Office, Babylon 5, Mad Men, The Wire)
Ce jeudi, place aux moments 41 à 45 sélectionnés par les rédacteurs marsiens. Au programme aujourd’hui, The Shield saison 7 (Indice spoiler 9/10), The Office saison 2 (Indice spoiler 8/10), Babylon 5 saison 3 (Indice spoiler 7/10), The Wire saison 1 (Indice spoiler 3/10) et Mad Men (Indice spoiler : 4/10) . Bonne lecture !
41. Vic Mackey se confie
par Dominique Montay
La série : The Shield
L’année : 2008
Les épisodes : 7×12 – Possible Kill Screen
The Shield reste encore à ce jour un modèle de série-télé. D’abord de part sa longévité. 7 années de diffusion. Mais aussi par sa constance. En terme de qualité, The Shield s’est toujours maintenu à un niveau allant de l’honorable à l’époustouflant. Une gageure. Sa septième saison sera un magnifique baroud d’honneur, permettant, entre autres, de révéler définitivement Walton Goggins aux yeux du grand public. De comédien honnête jouant un redneck bas de plafond, il s’est transformé en acteur habité interprétant un personnage au destin tragique.
A un épisode d’une fin bouleversante, The Shield nous sert une scène magistrale. Vic Mackey est à quelques jours d’une retraite forcée mais souhaite continuer son bel ouvrage dans une nouvelle maison, l’ICE (La police des douanes et de l’immigration). Mackey, pour récupérer un badge grâce à cet organisme (qui lui assure l’immunité), doit avant toute chose confesser tous les crimes qu’il a commit depuis la création de la Strike Team. Jusqu’ici, Mackey avait fait du Mackey avec l’ICE. Des bobards, du flan, assénés avec une telle sincérité qu’il est impossible d’en douter. La même chose qu’il servait au téléspectateur depuis le début de la série (protéger sa famille, protéger son équipe, le fait qu’il soit un mal nécessaire…).
Ici, Mackey verbalise enfin toutes les horreurs dont il a été le perpétrateur ou le commanditaire. Le constat au final est sans appel: Vic Mackey est un monstre. Dans cette scène, Mackey n’est pas bouleversé, il est ennuyé. Ennuyé d’avoir à dire pour la première fois la vérité. On ne sent pas de la honte chez lui, de la gêne. Dans ce moment, peut-être que Vic arrête de se mentir à lui-même, embrasse sa condition d’ordure. De l’autre côté de la glace sans teint se tiennent Dutch et Claudette. Claudette est proprement ulcérée. Elle savait Vic pourri mais pas à ce point. Lorsqu’Olivia, l’agent de l’ICE qui a fait des pieds et des mains pour lui obtenir cette immunité, se rendant compte avec quel diable elle vient de passer un deal, lui dit « vous réalisez ce que vous êtes en train de me faire ? », Vic Mackey répond juste « J’ai fait pire ».
Glaçant.
42. Jim avoue à Pam qu’il est amoureux d’elle
par Nicolas Robert
La série : The Office
L’année : 2006
L’épisode : 2×22 – Casino Night
Redécouvrir cette séquence, c’est se souvenir qu’au milieu des années 2000, The Office était la meilleure comédie américaine à l’antenne… et de loin. Pendant les deux premières saisons de la série, Greg Daniels et son équipe vont développer par petites touches l’histoire de Jim et Pam. Elle est douce, discrète et en couple avec le mauvais mec. Il est drôle, timide et parfois maladroit avec elle. Et dans un timing parfait, leurs routes vont les faire se retrouver sur le parking d’un casino.
Quand Jim avoue à Pam ses sentiments, c’est après avoir longtemps hésité. Reculant l’échéance à de multiples reprises, il finit par tout lui dire dans cet épisode. Avec simplicité, de manière pudique mais en toute sincérité… juste avant que Pam ne lui dise qu’elle ne peut pas être avec lui. Si cette scène est formidable, c’est parce que Jenna Fischer et John Krasinski livrent une interprétation d’une grande justesse (Krasinski n’oublie jamais la fragilité de son personnage). Quelques minutes plus tard, la scène finale de l’épisode finira d’achever tous les coeurs sur pattes qui sont amateurs de comédies romantiques bien fichues.
Si vous aimez les très belles histoires, aussi drôles et justes que touchantes, vous ne pouvez pas ne pas faire l’impasse sur les deux premières saisons de The Office. C’est impossible. Et après ça, il y a la saison 3, Gay Witch Hunt et le baiser de Michael et Oscar dès le premier épisode (donc il faudra continuer).
43. Babylon 5 fait sécession
par Sullivan le Postec
La série : Babylon 5
L’année : 1996
L’épisode : 3×10 – Severed Dreams
Le Capitaine Sheridan a mis en lumière des preuves de l’implication de Clark, le Président de l’Alliance Terrienne, dans l’assassinat de son prédécesseur. La Terre dérive de plus en plus vers la dictature. Quand un vaisseau rebelle qui a entamé la lutte contre le Président illégitime est obligé de faire escale sur Babylon 5 pour des réparations, le camp dans lequel se trouvent la station et Sheridan apparaît au grand jour. La sécession décidée par le Capitaine, au terme d’une escalade d’une saison et demie, va être la cause du premier conflit majeur de la guerre civile.
Avec cet incroyable épisode-pivot, Babylon 5 démontrait qu’elle s’inscrivait à part des séries qui l’avaient précédé, particulièrement dans le genre de la science-fiction, friand du reset button de fin d’épisode. Le cadre dans lequel évoluaient les personnages pouvait changer : l’indépendance de la station remettait en question le postulat de départ, celui d’un ONU de l’espace lancé par la Terre pour favoriser la paix. Babylon 5 devenait un avant-poste dans une double guerre. Celle, intérieure, qu’elle menait contre l’administration corrompue de l’Alliance Terrienne, et l’autre extérieure qui l’opposait à la mystérieuse et très puissante race des Ombres, de retour après 1000 ans.
Aujourd’hui, il est difficile de ne pas être étonné par les images de synthèse proches du jeu vidéo. A l’époque, le caractère épique de la saga était tel que j’ai eu l’impression que la bataille spatiale de cet épisode durait 30 minutes, alors qu’elle atteignait à peine le tiers de ce temps. De fait, la série était extrêmement bien produite et mettait chaque centime de son minuscule budget – 800.000 dollars de l’époque – à l’écran.
44. Une histoire d’orteils
par Dominique Montay
La série : Mad Men
L’année : 2009
L’épisode : 3×06 – Guy Walks Into an Advertising Agency
Dans beaucoup d’autres séries, cet évènement aurait été un parmi tant d’autres. Mais dans Mad Men, série à la narration lente, peu habituée aux chocs visuels, construite autour des évolutions de personnages, voir un type se faire broyer le pied par une tondeuse à gazon fait tomber la mâchoire inférieure au niveau de la voûte plantaire.
Sterling Cooper vient d’être racheté par une compagnie londonienne. Cette dernière décide de faire une journée d’inspection. Dans ses rangs, un jeune cadre à l’avenir tout tracé, Guy MacKendrick. Le type est beau gosse, a la démarche assurée… il impressionne.
Ken Cosgrove vient de gagner le contrat « John Deere » qui fabrique, entre autres, des tondeuses à gazon. Et Sterling Cooper en a une dans ses locaux. Alors forcément on s’amuse, c’est la veille du 4 juillet après tout. Certains employés conduisent fièrement la tondeuse, sous les yeux amusés des anglais. Et au milieu trône Guy, sûr de lui, presque arrogant. Jusqu’à ce que Loïs, une secrétaire un peu gauche prenne le volant… et brise la carrière du Guy en lui boyant le pied. C’est choquant. C’est inattendu. Mais c’est surtout drôle, et en plein milieu d’un épisode brillant, qui plus est.
Roger Sterling, pas le dernier pour les interventions mémorables, dira après les évènements « Believe me, somewhere in this business this has happened before. »
45. Fuck
par Dominique Montay
La série : The Wire
L’année : 2002
L’épisode : 1×04 – Old Cases
The Wire est souvent hissée au firmament des séries pour son réalisme de tous les instants. La scène que j’ai choisi est pourtant tout sauf réaliste. On y voit l’écriture du scénariste, on voit la performance des comédiens. Il s’agit plus d’un exercice de style, une variation brillante sur le même terme, loin de ces éléments que ceux qui la portent aux nues avancent (la dimension politique, le discours sociologique, la réflexion sur le système éducatif…).
Cette scène rappelle que The Wire est une série télé avant de servir de mètre-étalon de la qualité télévisuelle, écrite par des scénaristes, capable de mettre 4 minutes de fiction où le seul contenu des dialogues est le mot « fuck ». Ça ne la rend pas moins noble. De mon point de vue c’est même plutôt l’inverse.
http://www.youtube.com/watch?v=o6cN8HujPW8
ah The Shield !! le season final de la saison 5 devra obligatoirement être dans le classement ainsi que le double épisode final. Tellement énorme cette série.
Par contre, quasiment à la moitié et toujours pas de Seinfeld… pas de blague les gars
The shield… putain de série. Pour moi le plus grand moment c’est la mort de Lemansky assassiné par Shane … J’avais rarement été aussi ému. Puissant !
J’ai commencé à regarder The Wire, je n’ai vu que 5 épisodes à ce jour. Mais bon sang, que j’ai ri pendant cette scène, pourtant pas si drôle… Je me suis dit que Debra Morgan faisait bien pâle figure à côté ^^
Un grand grand moment ^^
Comme déjà dit, mais The Shield est clairement une série monstrueuse, excellente sur des biens des points. Et il est vrai que la fin de la série est particulièrement bon.
Entre la mort de Shane et de sa famille, et le moment ou se rend compte que Vic est vraiment un enc… et que Ronnie se fait coffrer…pffiou quelle fin!
Il y’aura sans doute d’autres scènes de Mad Men, mais un peu déçu de voir celle-ci sélectionné. Il y’a beaucoup mieux, et pas juste 1 ou 2 fois dans la série à mon avis.
The Wire est une série à l’écriture incroyablement exigeante et réussie, et je pense qu’aucun de ces « gens qui la porte aux nues » n’ignore ce fait. Mais je pense que l’ambition majeure de la série ne s’est jamais cachée dans la qualité de son écriture, qui n’aura été qu’un moyen et non une fin, contrairement à Breaking Bad par exemple, dont la virtuosité et la capacité à mener sa narration de manière originale ou inattendue sont des enjeux au cœur de la série, tout autant que la descente aux enfers de Walt.
A mon avis, l’intérêt de The Wire, et la raison pour laquelle son aura n’a cessée de croître depuis son arrêt, c’est que sur les fondations solides de ses intrigues et de sa galerie de personnages, elle a su construire un propos complexe, cohérent, lourdement argumenté et quasiment exempt de tout manichéisme (à l’exception de quelques marottes propres à son auteur) qui résonne d’une manière ou d’une autre avec l’environnement quotidien du téléspectateur occidental lambda.
Tout ça pour dire que l’écriture de la série est certes brillante et que Dominique à cent fois raison de lui rendre justice ici, mais toujours selon moi, ce sont bien ses ambitions thématiques et politiques qui lui ont valu ses lettres de noblesse, et je suis heureux que se soit avant tout pour cela qu’on se rappelle de The Wire encore aujourd’hui et pour longtemps.
« That’s life… one minute you’re on top of the world, the next minute some secretary is running you over with a lawnmower. » (Joan) 🙂