
Séries Mania, saison 4 : Gros plan sur The Fear (GB)
La série de Channel Four avec Peter Mullan en tête de générique avait, lundi 22 avril, l’insigne honneur d’ouvrir le bal des projections de cette nouvelle édition de Séries Mania. Verdict : si vous avez aimé Boss, ça pourrait vous plaire. Mais c’est pas sûr.
La série, côté histoire
Richie Beckett (Peter Mullan), un entrepreneur mafieux, rêve de reconstruire une zone abandonnée à Brighton. Mais il se trouve confronté à une bande de malfrats albanais particulièrement féroces, tandis qu’une forme de démence commence à l’atteindre. Ses deux fils tentent de contenir la situation… mais en fait, ils ne sont vraiment pas doués.
La série, côté casting
Diffusée par Channel 4 en 2012, la série compte quatre épisodes de 45 minutes. Outre Mullan, on retrouve Anastasia Hille (vue dans un épisode de la saison 7 de MI:5) et surtout Harry Lloyd, aperçu dans La Dame de fer au cinéma et dans la première saison de Game of Thrones (il joue Viserys Targarien-1).
Imaginée et écrite par Richard Cottan, scénariste de plusieurs enquêtes du commissaire Wallander, la série est mise en scène par Michael Samuels (et… son pedigree est là)
Les cinq choses qu’on a retenues de la projection
1. C’est la série de Peter Mullan. Le bonhomme porte le projet sur ses épaules : c’est à lui que l’on doit les meilleurs moments. Principalement dans les deux premiers épisodes. Bon, soyons honnêtes : il n’est pas aussi bon que dans Top of the Lake et a tendance à cabotiner un peu. Mais n’est pas Jane Campion qui veut.
2. Michael Samuels en fait souvent trop à la mise en scène. C’est un peu problématique: dès qu’un réalisateur décide de filmer au plus près ses personnages, dès qu’il veut coller à leur complexité, ça devient vite lourd. Bill D’Elia et Monday Mornings s’étaient pris les pieds dans le tapis à ce sujet, et Samuels ne fait pas mieux. Multipliant les effets de style, sa mise en images à tendance à « stabyloter » le récit. Ce qui est plutôt moyen. Et puis surtout, c’est ce qui fait qu’on s’aperçoit que l’identité visuelle de Boss, le travail de Gus Van Sant, c’est autre chose.
3. Le récit est piégé par certains partis pris du scénariste. En racontant l’histoire de Richie Beckett, Cottan raconte celle d’un homme qui est en train de perdre pied dans un univers où le moindre faux pas est fatal. Pour cela, il décide de décrire une descente aux enfers sur quatre fois quarante-cinq minutes. Quand Richie a encore ses repères, le récit reste assez fluide. Mais quand ce n’est plus le cas, le temps est plutôt long. Douloureusement long. Pire : l’histoire devient bordélique. Quand c’est Abi Morgan qui le fait pour La Dame de fer, ça passe car elle n’oublie jamais l’émotion. Quand c’est Richard Cottan, en revanche…
4. Au delà du héros, pas grand’chose (ou si peu). S’intéresser à la déchéance d’un homme de pouvoir qui est aussi un père, c’est aussi s’intéresser à ce qui traduit son pouvoir et s’arrêter de façon significative sur sa famille. Pour donner du relief à la déchéance, justement. C’est en tout cas un bon moyen de générer une émotion forte, complexe. Hélas, Cottan ne fait ni l’un ni l’autre.
Beckett veut réaménager le front de mer de Brighton ? Tout ceci ne se traduit qu’avec quelques panneaux et une maquette d’architecte. C’est peu. Le mafieux a un fils préféré et un autre qui ne lui apporte que des embrouilles ? La richesse de la situation est siphonnée par des twists plus ou moins vermoulus, et qui privilégient la forme au fond. Le tout, sans trop se soucier des conséquences émotionnelles (quand Viserys Targarien est violemment maltraité par des Albanais à cause de son abruti de frère, il sanglote sous la douche. Une fois. Bigre). Et c’est la même chose avec Jo, sa femme. En pire.
5. La fin, c’est du grand n’importe quoi. Sans spoiler la dernière séquence, on ne peut s’empêcher de vous dire que c’est particulièrement grotesque. Déterminé à affronter le destin, Richie a successivement trois scènes avec ses deux fils et sa femme. Trois scènes singulièrement balourdes. Dans sa volonté de proposer un final puissant, Cottan enchaîne les idées idiotes comme un buteur de rugby passe les pénalités : c’est carrément le challenge Morgan Parra de la bêtise ! C’est vain, très maladroit et surtout complètement raté. Autant vous le dire : si en regardant The Fear, vous craignez de croiser des personnages très sombres comme dans Boss, vous pouvez être tranquilles. En fait, ils sont juste très stupides.
(1) : Ce qui fait de lui l’acteur en meilleure position pour remporter l’oscar du meilleur fils de roi fou. Si on le crée un jour.
Vu également « The Fear » hie soir à SériesMania. Et… je ne suis pas du tout du même avis. Le scénario a ses faiblesses, mais je trouve le tout assez brillant et transcendé par l’interprétation de Peter Mullan vraiment grandiose.
Les personnages secondaires sont un peu sous exploités (dont celui du médecin ex ami de Beckett), mais la série dure en tout juste 3h ! Globalement le personnage de Jo, femme loin d’être soumise et plus impliquée qu’il n’y parait à premier abord, me plait. Les deux frères sont un peut caricaturaux mais c’est aussi symbolique. Et je trouve que Cottan n’appuie pas trop le trait justement sur les réactions des personnages aux évènements (ouf).
Et j’aime beaucoup la fin pas idiote du tout.
Quant à la comparaison avec « Boss » oui mais non. C’est une très bonne série, mais Kane lui-même, ou le personnage de la fille de Kane qui fait dans le social, c’est pas attendu et caricatural ça ?
Pour ma critique complète c’est là :
http://www.cinemaderien.fr/2013/04/23/the-fear-2012/
Nicolas mets tes gants je suis prêt à me battre !
Bonjour Nicolas,
Je suis globalement d’accord avec toi pour Mullan. Par contre, je pense sérieusement que sans trop appuyer le trait sur les réactions des personnages, Cottan aurait pu circonscrire leurs relations dans quelque chose de plus solide.
Le personnage joué par Lloyd, par exemple, a tout pour être un vrai personnage tragique, et pour moi les choses glissent sur lui sans le moindre souci ou presque (l’agression dont il est victime, la visite chez les Albanais avant que son frère et son père ne débarquent et qu’il se fasse avoir, la scène de la plage et les limites « physiques » de l’idée finale). Pendant que son père perd les pédales, il y avait de quoi lui donner plus de densité sans tomber dans le pathos.
Le personnage de Jo est surprenant et sa scène finale intéressante, mais j’ai eu un peu de mal sur toute la partie finale des flashback. Mais je conviens que c’est subjectif, évidemment.
Pour moi, Cottan privilégie trop le rythme au détriment de la psychologie, de ce minmium qui permet aux téléspectateurs d’être vraiment embarqués. Il met tout sur les épaules de Mullan qui, encore une fois, fait bien le boulot mais ne peut pas tout faire.
Enfin, pour Boss, je compare en terme de thème. Je ne dis pas que la série est exempte de critiques et de choix caricaturaux (au contraire).
Je te donne donc rendez-vous sur le ring quand tu veux : je vais chercher mon short rouge mars 😉
Bon ok de mon côté ce sera un short union jack of course ;p
Merci en tout cas pour ton commentaire : avec le lien qu’il contient, les curieux pourront avoir deux appréhensions/deux critiques bien différentes de la série (et méfie-toi, je suis comme Rocky : je fais tout à la fausse patte 😉 )
Merci, Nicolas (Robert) pour cet avis qui résume parfaitement mes impressions de The Fear. Très déçue.
J’ai adorée cette série , la famille et le propos est classique voir cliché mais le traitement de l’image avec les flashs back , la violence autant physique que psychologique et la musique ma plu . Je trouve que le duo Richie/Matty est fonctionne parfaitement avec beaucoup d’émotion s’en en faire trop . D’ailleurs le personnage de Matty est pour moi celui qui sort du lot tout en retenue froide mais tu sent que si il pouvait les défoncer il le ferait mais il a peur de tout perdre . Lloyd a pas trop de chance entre GOT et la question châtiment …