
LucasArts : après la chute, le renouveau ?

L’Homme d’Or se voit pousser des oreilles…
Moins de trois mois après le rachat de l’empire Lucas par Disney, on est en droit de s’interroger sur le futur de LucasArts, la filiale jeux vidéo de Lucasfilm. Aujourd’hui sur le banc de touche, cette société a pourtant connu de grandes heures dans les années 90 avec ses géniales licences comme Monkey Island, Maniac Mansion ou Indiana Jones… Des coups d’éclat suivis d’une sur-exploitation de la licence Star Wars et d’une déchéance artistique dans les années 2000. Où en est LucasArts aujourd’hui ? Petit retour sur une firme qui nous a tant donné… puis tant déçu. Avant un grand retour ?

Kinect StarWars : une hérésie pour les fans !
Si LucasArts semble dans le coma depuis quelque temps, l’éditeur existe pourtant toujours bel et bien, hélas plus pour le pire que pour le meilleur. Sur son site officiel, son palmarès récent mentionne LEGO Star Wars, LEGO Indiana Jones, Kinect Star Wars et le MMORPG* Star Wars the Old Republic… Has-been, vous avez dit has-been ?
Et pourtant rappelons-nous : en 1982, lorsque Georges Lucas crée LucasFilm Games (qui deviendra LucasArts Entertainment Company en 1990), il fait figure de visionnaire. Il a alors déjà une bonne idée du fort potentiel du jeu vidéo, qui va devenir plus tard la principale industrie du divertissement. Et l’avenir lui donnera raison puisque depuis 2002, le chiffre d’affaire mondial du marché du jeu vidéo dépasse régulièrement celui du cinéma (en 2011 : 75 milliards de dollars pour le premier, contre moins de 33 milliards pour le 7e Art).
Réalisateur contesté, Lucas s’est avéré plus inspiré comme producteur (l’un des sujets du Débat de la chaîne Game One diffusé le 10 janvier), sachant surfer sur la bonne vague au bon moment, en investissant principalement dans l’innovation. Dans les effets spéciaux avec I.L.M. (Industrial Light & Magic), dans les effets sonores avec Skywalker Sound et donc dans les jeux vidéo avec LucasFilm Games. Un passionné de technologies qui a réussi de gros coups de poker… et qui est aujourd’hui à la tête d’une fortune !

Les Monkey Island garderont toujours une place dans le coeur des vieux gamers
Autre preuve de son flair financier : la vente de produits dérivés Star Wars, qui a rapporté à ce jour plus de 22 milliards de dollars (contre ‘seulement’ 4,2 pour les entrées au box-office des 2 trilogies), le merchandising le plus rentable de la planète ! Il a aussi su s’entourer des bonnes personnes pour faire de ses studios de développement des précurseurs en matière de révolutions technologiques. Par exemple, dans les années 90, chaque grand hit de LucasArts se voyait créer son propre moteur de jeu (aujourd’hui ça ne se fait plus, on recycle les technologies) !
Parler d’innovation au sujet de LucasArts n’est pas surfait : 1ère bande-originale sur un jeu vidéo pour Ballblazer (1984), 1er simulateur de vol qui permettait de rejouer ses missions pour Battlehawks 1942 (1989), 1er jeu d’aventure avec des scènes cinématiques et avec une interface à la souris (Point & Clic) pour Maniac Mansion (1987), 1eres vidéos en full-motion dans un jeu pour Rebel Assault (1993), 1er CD-Rom ‘parlant’ (avec des lignes de dialogue enregistrées avec de vraies voix) pour Indiana Jones and the Fate of Atlantis (1993) et la liste est encore longue !

Day of the Tentacle, le meilleur Point&Click de tous les temps !
Toutes ces ‘petites révolutions’ ont fait de LucasArts l’un des leaders du jeu vidéo de 1984 à 1993 environ (talonné par Sierra et Cyan). Neuf années de leadership, ça n’est pas si mal sur les 40 ans d’histoire du jeu vidéo ! Tous les gamers de plus de 20 ans réagissent forcement quand on leur parle de The Secret of Monkey Island, de Day of the Tentacle ou Loom. Des jeux qui sont encore aujourd’hui parmi les favoris de beaucoup de joueurs vétérans, pas seulement pour leurs innovations technologiques, mais aussi pour leur ambiance atypique et leur humour déjanté.
Un exemple parmi d’autres de l’originalité des jeux LucasArts de la belle époque : le 1er Sam & Max (Hit the Road), aujourd’hui récupéré par Telltale Games (des anciens de LucasArts). Dans ce titre, un détective à tête de chien et son assistant – un lapin complètement cinglé – doivent résoudre des affaires comme la disparition d’un Big Foot ou d’une girafe. Je vous le confirme : un concept bien WTF et ultra fun ! D’ailleurs, un petit détail ne trompe pas : la mention “Parental Advisory Twisted Humor” (“Avertissement parental : humour tordu”) qui était apposée sur les boîtes du jeu. On a peine à le croire aujourd’hui mais ce côté complètement décalé fut la marque de fabrique des équipes de développement de chez Lucas et leur a permis d’acquérir une réputation de passionnés géniaux et de créateurs de hits en cascade.

Dans StarWars Battlefront, dirigez vos troupes dans des batailles épiques
Mais depuis quelques années, LucasArts ne fait plus le ‘buzz’. Les années 2000 avaient pourtant vu naître de bons titres comme Knight of the Old Republic (ou KOTOR pours les aficionados), Galaxies, Battlefront ou Le Pouvoir de la Force mais malheureusement aussi beaucoup de ratés, beaucoup trop. Quasiment disparu des écrans, le logo de la firme n’est plus présent que sur quelques boîtes de jeux labellisés Star Wars ou Clone Wars. Je préfère éviter de parler du MMORPG Star Wars The Old Republic qui a nécessité 6 ans de travail… et qui pourtant a fait très peu d’émules.
Lors de l’annonce du rachat par Disney, la première peur légitime des gamers a donc été que la firme de Burbank ne pose un grand filtre « niaisant » sur les futures productions de LucasArts et en particulier sur Star Wars 1313, le prochain blockbuster de l’éditeur. Annoncé comme LE prochain d’aventure-action de la licence, Star Wars 1313 devrait nous mettre aux commandes d’un chasseur de primes au sein d’une galaxie occupée, le tout dans une ambiance assez dark et violente… Je le vois mal passer en PEGI 12+ (habituellement ce genre de jeu ‘adultes’ est classifié PEGI 18+) pour tenter de toucher un public plus jeune…
L’ère Disney va-t-elle permettre à LucasArts de revenir sur le devant de la scène vidéo-ludique après plusieurs années de repos sur ses lauriers ? Ce rachat sera-t-il enfin l’occasion d’un vrai renouveau créatif conduisant LucasArts à sortir du sempiternel univers Star Wars ? Disney va-t-il faire confiance aux équipes en place, leur laisser leur liberté artistique, ou vouloir tout révolutionner à sa sauce au risque de décevoir les fans ancestraux ? Prions pour que la fougue éternellement juvénile de Mickey redonne le moral aux troupes et ne les se laisse pas plonger inexorablement dans le côté obscure de la Force vidéoludique…
* : Massively Multiplayer Online Role-Playing Game, ou Jeu de rôle en ligne massivement multi-joueurs en français, comme World of Warcraft par exemple.
Je voulais revenir sur cette bizarrerie qui veut que le chiffre d’affaire des jeux dépassent celui du cinéma. On oublie souvent de dire que le produit « jeu vidéo » coûte à l’achat 4 à 5 fois plus cher qu’une place de cinéma (ou un dvd / blu-ray), pour un investissement compris entre 18 et 28 millions de dollars, soit 2 à 3 fois moins qu’un film d’exploitation « normal », à savoir hors circuit indépendant. Compte tenu de cette différence, il n’y a aucun mal à ce que le jeu rapporte plus que le cinéma, c’est même tout à fait normal et cela n’a rien d’exceptionnel. Le contraire en revanche serait très inquiétant.
Pas faux. N’empêche que, niveau commercial, c’est le Chiffres d’Affaire (et à la rigueur la Marge) qui compte, moins le notre de ‘pièces’ vendues héhé 😉
Pitié ! qu’on nous ponde pas Star War 2024 – la Revanche de Dark Mickey !
C’est déjà en cours…
http://starwarsblog.starwars.com/index.php/2008/06/04/new-star-wars-disney-figures-coming-this-fall/
(rires diaboliques)
Pour le coup, si la question intéressante la réponse est toute faite : non LucasArts ne reviendra pas à l’apogée de son art. D’une parce que ce qu’elle proposait à l’époque était innovant et avait son public, et de deux parce que la force de ses studios c’était la créativité de ses deux génies : Ron Gilbert et Tim Schafer.
En effet, il n’y a plus trop de public pour les Point&Clic PC, qui étaient leur spécialité.
Quand à Ron et Tim, ils ont tenté de faire passer leur ‘pâte’ ailleurs, mais ça n’a pas vraiment pris, dumoins pas autant que leur précédents succès chez LucasArts.
Perso, j’ai beaucoup aimé DeathSpank et Brütal Legend, mais commercialement, ça n’a pas été ça :/
@Kasilla « il n’y a plus trop de public pour les Point&Clic PC »
Bizarre de dire ça en janvier 2013 alors que The Walking Dead est considéré unanimement comme GOTY, alors qu’on vient de découvrir une pépite comme Kentucky Route Zero, que le projet kickstarter de Double Fine (Tim Schafer) a récolté plusieurs millions de dollars et que Ron Gilbert revient dans quelques jours avec The Cave.
Certes ce n’est pas un raz-de-marée mais du point de vue créatif, on n’est pas loin du renouveau du jeu d’aventure graphique qu’on nous avait promis au milieu des années 2000.
Pour ma part (mais ce n’est que mon avis) ces licences spécifiquement touchent un public de fans.
Mais si le genre peut revenir à la mode grâce à ce type de production, je suis plutôt pour ^^
Je pense que les chiffres parlent pour Kasilla, quelque part. Quand on regarde les gros hits, le point ‘n click n’en fait pas vraiment parti. Cela ne veut pas dire que les derniers jeux du genre ne sont pas reconnus par la critique ou qu’il n’existe pas un public de niche mais de là à croire qu’ils soient générateurs de hits commerciaux.
Et je me demande s’il n’est pas un peu desuet comme genre auprès d’une nouvelle génération (même si le public consommateur vieilli) – cela dit, venant d’un fan du point’n click, des chevaliers de Baphomet à Blade Runner en passant par Atlantis ou évidemment Monkey island.
Oui il y a probablement un effet générationnel. Et quand on voit que les hits actuels c’est surtout du Call of Duty ou du Halo…
L’industrie n’est certainement plus la même entre les années 90’s propices à la créativité, et aujourd’hui.
S’il a bien quelques séries qui existent toujours, ce ne sont évidemment plus des locomotives comme à l’époque.
LucasArts a perdu de son aura, et impossible pour eux de revenir sur le devant de la scène. On le voit déjà, l’effet « WOOOOW » de Star Wars 1313 s’essouffle déjà à mesure que l’on s’approche de cette fameuse nouvelle génération de consoles. Rêver que LucasArts redevienne un des développeurs majeurs de l’industrie, revient à espérer que SEGA sorte à nouveau une console. Le temps a fait son effet, au moins, LucasArts n’a pas fermé ses portes. Et pour notre nostalgie, c’est déjà pas mal.
Il est clair que si on veut de la créativité aujourd’hui, il vaut mieux regarder du côté des productions indé.
Maintenant, si Disney a racheter Lucas c’est aussi pour faire des sous et les gars de Disney Interactive montrent qu’ils voudraient faire du ‘vrai’ jeu vidéo et plus seulement des adaptations fades (je pense aux Epic Mickey).
On peut donc espérer qu’ils vont se servir des nouvelles recrus dans ce but.
Mais c’est évident : aucun d’entre eux ne reviendra jamais à leur superbe d’antan, il va falloir laisser la place aux petits nouveaux plus audacieux.