
Mad Max – Fury Road : il est libre, Max (la critique !)
Trente ans après le troisième volet de la saga, Mad Max ressuscite de la main de son propre créateur, le “mastermindˮ George Miller. Ça valait le coup d’attendre ? Oh, que oui ! Avec le vrombissant Fury Road, le fringant cinéaste de 70 ans vient tout simplement de réaliser l’un des plus grands films d’action de tous les temps. À voir sur l’écran le plus large possible, avec le son à fond. Préparez-vous au choc ce 14 mai – jour de délivrance et de présentation cannoise. What a Lovely Day !
Putain, trente ans ! Trois décennies sans nouvelles de Max ! Alors que, pendant une quinzaine d’années, on s’est fadé sept épisodes bourrins de Fast & Furious, sommet de vulgarité et de beauferie. Cherchez l’erreur. Heureusement, George Miller revient aux affaires, mes frères, et il va mettre Vin Diesel et sa bande de tocards à l’amende. Car plus “furiousˮ que Fury Road – ou Furiosa –, y’a pas !
Depuis juillet 2014, date de la découverte du premier teaser au Comic-Con de San Diego, on ne vivait plus que dans l’attente fébrile de ce film. Mieux : on cochait les jours qui nous séparait de sa sortie. On fantasmait sur cette arlésienne cinématographique, sans cesse annoncée, maintes fois repoussée. En 1993, Miller évoquait déjà l’idée de tourner un quatrième Mad Max en relief (à l’époque, la 20th Century Fox était censée produire le film). Alors, à la longue, on pouvait croire que ce nouvel opus ne verrait jamais le jour.
C’est donc le cœur battant, et avec une certaine appréhension, que l’on s’est rendu avec quelques membres du Daily Mars à la toute première séance du film, dans la magnifique salle parisienne du (Mad) Max Linder, pour découvrir “la bêteˮ dans des conditions optimales (en dehors de l’IMAX, Max !). Car, pour ma part, l’enjeu était de taille : retrouver l’extraordinaire sensation que j’avais éprouvé à 11 ans en découvrant Mad Max 2 au cinéma. Bon Dieu, il n’avait pas le droit de le rater, celui-là ! Pas le droit d’abimer mes souvenirs.

Immortan Joe est interprété par Hugh Keays-Byrne, qui tenait déjà le rôle du vilain Toecutter, le chef du gang de bikers, dans le premier Mad Max.
MILLER’S CROSSING
George Miller réfute les termes de suite et de reboot pour ce blockbuster customisé. Il parle de relecture de la saga. Et il est vrai que ce long métrage au rythme effréné est une sorte de synthèse de l’univers mad-maxien (en particulier l’épisode 2 et 3).
Oubliée, la crise pétrolière, c’est l’eau qui vient désormais à manquer dans ce monde post-apocalyptique. Un monde où les fondements de la société ont subitement cessé d’exister.
Pendant trois quarts d’heure, Max se fait rudoyer par les sbires d’Immortan Joe, un seigneur de la guerre qui règne sur cette terre dévastée (il porte un masque orné d’un motif crânien et de dents de chevaux). Ce taré vivant dans une citadelle tient une population entière à sa merci, affamée et assoiffée.

Mais il la portait déjà quand il jouait Bane dans The Dark Knight Rises. De la suite dans les idées…
Le V8 Interceptor de Max est dérobé par l’armée du dictateur. Puis le héros masochiste est attaché à une chaîne et trainé dans le désert. On lui rase les cheveux. Il est tatoué de force, scarifié par des fanas de branding (marqué au fer rouge comme un animal !). Puis entravé par une muselière et une perfusion. Pour son baptême du feu dans la peau de Max, Tom Hardy vient de se faire bizuter en beauté par son réalisateur.
Avec sa tête de chien battu, l’acteur britannique (qui considère son personnage comme “un loup affaméˮ) se fait en plus voler la vedette par Charlize Theron ! C’est elle qui incarne l’homme fort de ce Mad Max : l’impératrice Furiosa, camionneuse butch qui libère cinq jeunes prisonnières de la secte d’Immortan Joe, où elles étaient réduites à l’état de simples reproductrices. Crâne rasé, Furiosa est une rebelle stérile. Une femme à poigne… amputée du bras gauche, qui conduit le War Rig, un camion-citerne de 2 000 chevaux boostés au nitrométhane. Forte et déterminée, cette néo-Jeanne d’Arc prend la fuite avec les cinq concubines du despote à travers le Wasteland. Traquée par une armada, elle sera aidée par Max, qui reprend la main dans la deuxième moitié du film et retrouve sa “mâle attitudeˮ, une fois sa muselière arrachée. S’ensuit une course-poursuite démentielle qui va vous coller à votre siège ! Cette course que rien n’arrête est parfois rythmée par les percussions de la Messe du Requiem de Verdi (Dies Irae), remixée par Junkie XL.
MAX ET LES FERRAILLEURS
Car Fury Road est désormais LA nouvelle référence en termes de cascades impliquant des véhicules. George Miller a en effet tourné les scènes d’action en prises de vue réelles – mais aussi en vitesse réelle -, en ne faisant appel aux effets visuels qu’en dernier recours. D’ailleurs, les trucages sont assez discrets, en dehors de la séquence de l’homérique tempête de sable, entièrement numérique car impossible à réaliser autrement (“On n’avait pas les moyens d’attendre une vraie tornadeˮ admet avec malice le réalisateur). Ce digne héritier d’Eisenstein et de Sergio Leone vient en tout cas de mettre la barre très haut avec ce spectacle aux effets pyrotechniques décoiffant. Visuellement impressionnant, le résultat est au-delà des espérances. Ce Mad Max 2.0 est raccord avec le climat hystérique des années 2010 et renouvèle la saga.
150 véhicules furent créés pour les besoins du film en Australie, sous la supervision de Colin Wilson. Des engins délirants comme ce camion à dix roues porté par deux moteurs de 500 chevaux. Et quand les barbares donnent l’assaut, ils attaquent le convoi grâce à de grandes perches flexibles (un délire digne du Cirque du Soleil, de La Fura dels Baus ou de la troupe d’Archaos). La course de char de Ben-Hur, à côté, paraît paisible.

Après les élastiques dans l’arène du Dôme du tonnerre, la dernière attraction de Mad Max : l’attaque des convois grâce à de grandes perches flexibles.
Le tournage, lui, en revanche, a été physiquement éprouvant. Il débute en juillet 2012 et se termine en décembre de la même année. Au départ, il devait se dérouler dans le désert de Broken Hill, en Nouvelle-Galles du Sud, à l’endroit même où le deuxième épisode avait été tourné. Mais la Nature en a décidé autrement. Des pluies diluviennes parfaitement inhabituelles ont en effet transformé le panorama désertique et la terre rouge de l’outback australien en jardin de fleurs. On n’avait pas vu ça dans le coin depuis quinze ans ! Du coup, l’équipe déménage en Afrique australe et passe six mois, ensablé, au beau milieu du désert namibien. Trois semaines de prises de vues supplémentaires sont ajoutées en novembre 2013, dans la région de Sydney. Après vision des rushes, Miller souhaite, en effet, accomplir des retakes pour améliorer des scènes d’action.
Avec 150 millions de dollars de budget (en 1981, le second opus en avait coûté deux !), le cinéaste veut proposer de l’inédit avec Fury Road. Si la pré-production a été longue, avec notamment la confection de 3500 planches de story-boards et des cascades longuement répétées, la post-production dure près de deux ans et demi. Un record. Il faut réétalonner entièrement le film (rien ne raccorde au niveau de la lumière), retoucher sur ordinateur près de 2000 plans sur 2700 et se charger également de la post-conversion en 3D. Malgré les retards et les dépassements de budget, Miller fait preuve de ténacité et amène le paquebot à bon port. Grâce aux premières projections-tests, aux résultats dithyrambiques, ce projet qui a connu une longue gestation devient même la top priorité de Warner, qui soigne le marketing et la sortie de ce “post nukeˮ de luxe. C’est une belle revanche pour Miller qui a tant lutté pour concrétiser son rêve.
LE FUTUR EST FEMME
Après avoir songé aux regrettés Heath Ledger (l’inoubliable Joker de The Dark Knight) et Paul Walker (le héros de la saga Fast & Furious), mais aussi à Sam Worthington (Avatar) et Jeremy Renner (Démineurs), George Miller a donc jeté son dévolu sur Tom Hardy, qui s’est laissé pousser la barbe pour l’occasion. Charismatique dans le rôle du cow-boy solitaire et hirsute, l’acteur prouve dans ce film qu’il en a sous le capot. Même s’il a du mal à rivaliser avec le souvenir de Mel Gibson, acteur à l’animalité autrement plus dangereuse. Hardy s’est déjà engagé pour trois suites éventuelles.
Mais comme on le signalait plus haut, c’est l’alter ego féminin de Max, Charlize Theron, qui impressionne vraiment, avec un moignon au bras, dans Fury Road. Proche de la Ripley d’Alien3, elle transforme cet épisode en manifeste féministe – car, pour George Miller, les femmes sont le dernier espoir de ce monde à l’agonie (en 2006, Les fils de l’homme tenait déjà le même discours). C’est elle qui apporte l’émotion dans ce western futuriste et elle est fantastique. Car Furiosa est sûrement le personnage le plus iconique de ce long métrage.
En prime, George Miller aborde des thèmes écologiques. Et se frotte surtout à la question du fondamentalisme religieux, à travers les personnages suicidaires des War Boys (parmi eux, l’excellent Nicholas Hoult dans le rôle de Nux), les soldats kamikazes et fanatisés d’Immortan Joe, prêts à mourir dans le désert pour leur maître et une place au Walhalla (suivez mon regard…). Les barbares sont à nos portes, semble dire le réalisateur avec cette mise à jour ô combien contemporaine du road warrior.
Sur la forme, la maestria technique de Miller s’exprime avec une ampleur encore jamais vu (voir le gigantisme des décors, construits en dur). Son équipée sauvage donne le tournis et défile à une vitesse affolante. Et si le montage-hachoir du film va faire débat, avec ses plans épileptiques, sa science du découpage n’en demeure pas moins époustouflante. Avec ses couleurs désaturées, la photo de John Seale (le chef-op’ du mythique Hitcher avec Rutger Hauer) est également à saluer.
IT’S A MAD, MAD, MAD, MAD WORLD
Tout le monde est cinglé dans l’excentrique et décomplexé Fury Road. Max lave le sang qui a éclaboussé son visage avec du bon lait maternel, un mutant fan de air guitar mime les riffs des hard rockers au lance-flammes et un sosie de Michel Petrucciani passe dans le champ harnaché de cuir. Carnavalesque. Mais aussi très drôle ce croisement entre la cour des miracles de Hieronymus Bosch et les cartoons délirants de Bip Bip et Coyote. Le film n’en oublie pas d’être violent, voire cruel, quand il faut, renouant avec la grande tradition.
Alors mieux ou moins bien que les deux premiers opus ? Difficile encore à dire après une première vision. Une chose est sûre : Fury Road offre de l’action pure à 100 % et c’est l’épisode le plus spectaculaire et ambitieux de la saga. Une sorte de Mad Max gonflé aux hormones. Ici, peu de dialogues. Le seul vrai langage c’est l’image.
Et ces deux heures de steampunk collent la chair de poule et provoquent, par leur intensité, une véritable extase cinétique.
Réalisé par George Miller (Australie-USA, 2015). 2h00. Avec Tom Hardy, Charlize Theron, Nicholas Hoult, Hugh Keays-Byrne, Rosie Huntington-Whiteley, Zoë Kravitz, Nathan Jones, Riley Keough, Josh Helman, Abbey Lee. Sortie le 14 mai 2015.
Toutes les photos de Mad Max : Fury Road sont la propriété de ©Warner Bros.
Le coup d’œil dans le rétro de la saga, c’est là !
Je ne peux juger par rapport aux 2 premiers opus, que j’ai vu il y’a plus de 10 ans, avec un vague souvenir, mais en tout cas ce Mad Max Fury Road, c’est le pied.
De l’action magnifiquement filmée, dynamique et jamais vue parfois, un univers post apocalyptique dément et génial. Tout en réussissant à insufler quelques messages, en imposant des personnages charismatiques et touchants sans aucune parole presque.
Bravo et Merci Georges Miller.
Ouaip, j’en sort, et c’est vraiment un film puissant.
Je viens de sortir d ‘ une séance de 14h et j ‘ ai des difficultés à trouver les mots justes pour décrire ce que j ‘éprouve .
Dans cet époque de standardisation de la production à grand budget et racolage au spectateur à tout prix(coucou Marvel studio) , Fury Road est un acte de résistance , un film salvateur . C’ est le film le plus couillu que j ‘ai vu dans une salle de cinéma .
Dr No dit tout le contraire, Nico.
Et je suis d’accord avec le Doc. Ce Mad Max est tout sauf subversif.
Un film à 150 millions de dollars n’est jamais subversif. Le premier Mad Max pouvait se permettre de l’être, car il coûtait 350 000 dollars.
Qu’est-ce qu’il faut pas lire…
C’est pas parce qu’on vit une époque de sans couilles qu’il faut oublier un temps pas si lointain où les blockbusters pouvaient être subversifs (un « critique » comme vous a déjà oublié Paul Verhoeven ?).
Mad Max Fury Road est subversif de par son contraste total avec la formule du blockbuster actuel. Et vu la réaction de nombreux spectateurs (critiques ou pas), il arrive à point nommé à un moment où le ras-le-bol des Marvel et du spectacle aseptisé tout-CGI commence à émerger.
Hello Ron,
J’aime énormément Mad Max Fury Road (je pensais avoir été assez clair dans la critique ci-dessus) et je suis un fan de Paul Verhoeven depuis sa période néerlandaise – c’est dire.
Ce que je trouve subversif dans MMFR, c’est d’avoir donné le rôle du héros… à une femme. Mais ce débat sur le côté subversif du film n’a pas été lancé par moi. Je n’attendais pas de cet épisode une œuvre subversive d’ailleurs. Mais un spectacle pétaradant. Ce qu’il est à 100 %. Je trouve, de plus, que pour un film à plus de 150 millions de dollars, Miller a pu exprimer sa folie avec une grande liberté (le studio ne l’a a priori pas bridé).
Au Daily Mars, tout le monde sait que je suis allergique aux films de super-héros Marvel ou DC, car on frise l’overdose. Je déteste les CGI aussi. Donc on est assez d’accord, en fait…
Grosse claque, c’est certain, surtout au niveau de la mise en scène, de la direction artistique et des cascades « en dur » qui déchirent!!
Des défauts, le film n’en manque pourtant pas:
– c’est parfois à la limite du ridicule pour ce qui est de la représentation des différentes « tribus », et on se croirait plus d’une fois revenu à l’époque du clip « Wild Boys » de Duran Duran, nostalgie des ’80s quand tu nous tiens…
Et le « culte du Dieu V8 », sérieusement ??
– la 3D était tout sauf « essentielle » pour un tel film, certains effets sont foirés, d’autres inutiles, parfois les deux, papy Miller est à deux doigts de céder aux sirènes commerciales sur ce coup-là, on lui pardonne mais c’est bien parce que c’est lui…
– une bande de top-modèles têtes à claques, engagées avant tout pour faire joli et pour « flatter le mâle », mais qui savent pas franchement jouer (euphémisme)… Plutôt difficile de ne pas penser au syndrome Michael Bay, grand spécialiste du « placement de Bimbos » dans ses nanars.
– Tom Hardy, malgré toute l’admiration que j’ai pour lui, n’a que partiellement les épaules pour assumer le passage de témoin avec l’iconique Mel Gibson, et le perso de Max est trop en retrait dans le film.
– Et enfin, le plus agaçant à mes yeux est que les références à « Beyond Thunderdome » sont beaucoup trop nombreuses et évidentes… Au point d’avoir parfois l’impression d’être devant un pur remake de ce dernier, ce qui ne serait pas illogique dans le fond, puisque Miller n’a jamais caché que le 3ème épisode n’était pas le film voulu à l’époque…
Après, force est de reconnaitre que malgré ses défauts, « Fury Road » enterre tout ce qui s’est fait en terme de blockbuster d’action depuis… depuis des lustres!!
Généreux, sincère, audacieux, mis en scène et monté avec tellement de talent et de panache qu’on ne peut qu’être emporté par un tel tourbillon… de furie!! Paradoxal certes, mais ne pourrait-on pas en dire autant de la personnalité de son auteur ??
(Par contre à voir en 2D, sérieusement.)
Hello Sylvrock,
Je n’ai pas encore vu le film en relief (je vais bientôt tenter l’expérience en 3D), mais certains plans semblent avoir été conçus dans ce but (le crash final du War Rig, par exemple).
C’est drôle, j’ai pensé comme toi au clip de The Wild Boys des Duran Duran pour les War Boys… Normal : ce clip a été réalisé par un compatriote australien de Miller, Russell Mulcahy, qui s’est inspiré d’ailleurs de l’univers de Mad Max pour ses music vidéos (c’est flagrant sur Arena, le concert du groupe).
Sinon, ce que je trouve raté dans le film, ce sont les flashbacks traumatiques de Max, concernant la mort de sa petite fille. Miller passe trop vite dessus et ne montre pas en entier la séquence. C’est frustrant. Je tique aussi dans la première partie sur quelques effets de montage dans l’air du temps (des images saccadées, des accélérés…).
Sinon quel film !
Ah oui tient, j’avais oublié les fameux flash backs…qui eux par contre rendent mieux en 3D!!
Comme quoi lol
La 3D est devenu un impératif commercial, imposé par les studios. Je pense que Miller n’a pas eu trop le choix. Chris Nolan a réussi à tourner Interstellar à plat et en argentique. Mais c’est parce qu’il rapporte beaucoup d’argent avec les Batman. Sinon peu de films ont bien utilisé la 3D ces dernières années (comme Avatar, Hugo Cabret, Pina et deux trois autres). Ce procédé n’existe que pour gonfler le prix du billet.
WTF ??? mdr
L’a pô compris.
les flash backs n ont rien à voir avec sa petite fille , étant donné qu’ il avait un fils dans le 1er opus…
je pense que Miller nous laisse sur la faim pour se poser ce genre de question…
qui sont ces personnes que Max n’a pu sauver??? nous l apprendrons par la suite…